« UN PROBLèME MONDIAL » : UNE éTUDE SUR DES PROGESTATIFS CONFIRME LE RISQUE DE TUMEUR AU CERVEAU

Alain Weill, directeur adjoint du groupement Epi-Phare, alliance de l’Assurance maladie et de l’Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM), prévient d’emblée : « C’est un problème de santé publique mondial ! » Lui et ses équipes ont étudié le risque de méningiome (ou tumeur des méninges, qui entourent le cerveau) lié à la prise de trois médicaments progestatifs. Ceux-ci peuvent être notamment utilisés comme contraceptifs, dans le traitement de l’endométriose, contre les saignements utérins, ou encore en traitement hormonal substitutif de la ménopause, selon les cas.

Cette étude conduite avec l’Assistance publique - Hôpitaux de Paris avait déjà été présentée, en français, en juillet. Elle est désormais parue ce mercredi soir dans le British Medical Journal, lui donnant une visibilité beaucoup plus large.

Les scientifiques ont récupéré les données de plus de 18 000 femmes âgées de 45 à 74 ans et opérées d’un méningiome entre 2009 et 2 018 en France, avant de les comparer à celles de 90 000 autres femmes. L’utilisation prolongée (au moins un an) de trois médicaments progestatifs est associée à un risque accru de tumeur des méninges nécessitant une intervention chirurgicale : 3,5 fois plus important pour le Colprone (molécule médrogestone), 5,6 pour le Depo Provera (acétate de médroxyprogestérone injectable) et 2 fois plus important pour le Surgestone (promégestone), qui n’est plus commercialisé en France depuis 2020.

74 millions de femmes traitées au Depo Provera dans le monde

De précédentes études avaient abouti à des résultats similaires pour l’Androcur, le Lutéran et le Lutenyl. De nombreuses Françaises se sont alors rabattues vers le Colprone, passé de 10 000 à 30 000 consommatrices en trois ans. Aucun risque accru n’apparaît pour les personnes traitées pendant moins d’un an, mais « si les femmes ont utilisé un autre progestatif à risque avant de passer au Colprone, elles présentent un risque accru de méningiome sans attendre un an », prévient Alain Weill. Dans ce cas de figure, l’ANSM recommande désormais de réaliser une IRM.

Le Depo Provera, un contraceptif injectable, est lui très peu utilisé en France (5 000 personnes concernées seulement) mais très largement dans le monde (74 millions). « Beaucoup de ces femmes sont défavorisées et vivent dans des pays à bas revenu économique », alerte Alain Weill. Treize millions de ces 74 millions de citoyennes résident en Indonésie, notamment. « Imaginez le nombre de méningiomes dans ce pays ! » s’inquiète le médecin spécialiste de santé publique. Dans un communiqué relayé par The Guardian, le fabricant du Depo Provera, Pfizer, se dit « conscient » de ce risque et indique qu’il va « mettre à jour les notices des produits ».

Cette étude est dite « observationnelle », mais « il y a très clairement un lien de causalité, car un ensemble d’études convergent et les mécanismes biologiques des progestatifs sur les tissus des méninges sont connus », développe Alain Weil. Bonne nouvelle, en revanche, pour la France : avec le stérilet hormonal, implanté sur environ 2 millions de femmes, aucun risque accru n’apparaît. « C’est très rassurant », avance le médecin. De façon générale, n’importe quel progestatif « doit toujours être prescrit à la dose minimale efficace et pendant une durée d’utilisation la plus courte possible », conclut l’ANSM.

2024-03-28T10:56:08Z dg43tfdfdgfd